Encore une nouvelle journée de vache maigre question vie sociale, mais une journée de grosse vache question vie intellectuelle.
Ce matin, je m’en suis allée au Vieux Porc (non, pas de typo) pour prendre le bateau. Pour ma thèse, hein, pas par pur goût du risque.
La tuile quand tu prends la mer, c’est que l’insécurité te tombe sur le coin de la tronche. Il faut être maso pour être marin. Un ouragan, ça prévient pas.
J’arrive sur la jetée, en tongue (et rien d’autre). Normal.
Je me dirige d’un pas décidé mais fataliste vers l’embarcation : un snekkar de 22 mètres de long, blindé de 32 rameurs vikings.
Erik-à-la-hache-sanglante est là. Il fulmine sur le pont. Sa hache vibre de colère. Il a l’engin rouge sang. Il est tendu le mec.
J’ai peur, mais en tongue, je ne peux pas fuir ; pas devant un viking nu-pied.
Je marque un temps d’arrêt pour enlever mes tatanes, avec l’idée saugrenue de lui savater la gueule s’il commence à me prendre le chou. (La dernière idée saugrenue que j’ai eu, ça a été de faire des steak-hachés avec des œufs. Je les rote encore.)
Je monte à bord, pas très rassurée ni très assurée d’ailleurs. Et pour cause.
« T’as pas signé la PRIME DE GROSSE ! » qu’il me gueule Erik.
Là-dessus, j’en mène pas large. Je voudrais même mourir. J’ai les cheveux qui collent et la morve au nez. La totale.
« La grosse quoi ? » je tente. Dans mon esprit, quelque chose se brise. La grosse commission ? On peut signer ces choses-là ? (Je pense avoir involontairement levé un sourcil intéressé.)
« La prime de GROOOOOOOOSSE ! » Un Viking avec une hache sanglante, qui hurle, c’est très effrayant. Pour le coup, je lui livrerais bien une grosse comm’ sur le champ (enfin, sur le pont).
Heureusement, Harald-à-la-dent-bleue vient à la rescousse : « Oui, le prêt à la grosse… tu sais… »
Bah nan. Je ne sais pas. Là : « Mais la grosse quoi, bordel ! »
« LA GROSSE AVENTURE ! » gueulent-ils en cœur.
Ah !
Plus tard, Inge-le-bossu m’expliquera qu’il s’agit d’un contrat par lequel un créancier prête de l’argent à un armateur avec l’espoir, en cas de succès de l’expédition, d’être remboursé…
L’espoir. Un truc de mou du genou !